Aujourd’hui, on se pose une question TRÈS importante : ça y est, les employés ont racheté l’entreprise dans laquelle ils travaillent. Ils sont maintenant co-propriétaires. Ce changement de posture, qu’est-ce que ça change au quotidien ?
La coop Edgar nous éclaire dans notre série balado sur le repreneuriat collectif.
Tout d’abord, les employés ont dû revoir leurs attentes et réajuster certaines perceptions :
- On peut avoir une image un peu « parfaite » de la coop : belle collaboration, consultation, etc. Or, cela ne se passe pas toujours comme ça et il peut y avoir des désaccords. Il est donc important de savoir comment gérer ces désaccords et prévenir les conflits. Pour cela, les coopératives en activité peuvent suivre des formations dédiées à ces sujets.
- Il n’est pas nécessaire de consulter tout le monde sur tout ! Il est ici important de bien définir la structure de gouvernance, clarifier les rôles et responsabilités, préciser les modes de prises de décisions.
- C’est donc l’une des premières étapes, à laquelle on ne pense pas assez : comment on va prendre nos décisions. Ce n’est jamais simple de le définir tant que la situation ne s’est pas encore produite, mais si ce n’est pas pensé d’avance, cela peut vite devenir le chaos. Cette réflexion pousse la coop à se recentrer, prioriser et mieux cadrer ses actions.
La coop va aussi s’attarder à consulter les 90 membres et employés sur leurs conditions de travail, leurs outils, ce qui les touche au quotidien et adapter au besoin les politiques internes. Travailler en collectif exige donc une gouvernance structurée : élire les administrateurs sur le conseil d’administration, et éventuellement prévoir des critères qui permettent de représenter l’ensemble des employés, mettre en place une coordination générale de plusieurs personnes, organiser des comités qui relèveront du CA, tout en continuant de communiquer avec l’ensemble des employés. Bref, toute une organisation ! La coop peut compter sur de l’accompagnement pour mener à bien la structuration de sa gouvernance.
Après deux années de coopérative, la coop tire aussi quelques enseignements pour le quotidien :
- Cela arrive de faire des erreurs, des annonces trop tôt, etc. L’indulgence des membres est de mise.
- La structure de gouvernance peut créer une certaine lourdeur, par exemple s’il faut rediscuter d’une décision prise en CA, donc retourner en CA, consulter les membres, etc. Cela prend plus de temps. D’où l’importance de bien définir qui peut prendre quelles décisions dans quelles instances, et développer des comités qui ont une certaine marge d’autonomie.
- Bien définir le mandat d’un comité, ses objectifs, la fréquence des rencontres, le nombre de personnes… pour qu’il soit le plus efficace possible.
- On n’a pas besoin que tout le monde s’implique au même niveau, surtout à 90 personnes. Tout le monde n’a pas besoin d’être entrepreneur. Si une personne ne veut pas du tout être impliquée dans la gestion, c’est quand même important de l’informer, par exemple par le biais de l’infolettre interne.
- Il faut prendre le temps de consulter les membres. C’est plus long, cela prend plus de temps, mais cela permet de prendre de meilleures décisions, créer plus d’adhésion et d’engagement des employés, et d’aider à rallier certaines personnes qui seraient en désaccord. On a moins l’impression de se faire imposer une décision quand on est consulté.
- Le fait de rédiger des procès verbaux lors des rencontres : cela oblige à se structurer, penser à long terme, mieux réfléchir les choses dans le temps.
- Écrire les décisions à part permet de s’y référer plus tard, de les retrouver plus facilement.
- La rencontre hebdomadaire Le Coop Hebdo, est un très bon outil pour faire l’éveil entrepreneurial des membres.
- Travailler dans une coop renforce le sentiment d’appartenance des membres.
- Des personnes appliquent pour travailler parce que c’est une coopérative.
Les membres de la coop se voient enfin plus dans une entité que dans une position individuelle : on va s’intéresser davantage au résultat final de son travail et à l’impact de son travail au sein de la coop. D’un autre côté, on travaille aussi pour soi : si la coopérative génère des excédents, ceux-ci vont être redistribués de façon équitable selon les heures travaillées – les efforts supplémentaires que l’on fait dans notre travail ne vont donc pas enrichir un patron mais bien revenir au travailleurs.
Enfin, en rejoignant le monde des coopératives de travail, la coop peut aussi participer à des communautés de pratiques, échanger avec les autres, intercoopérer dans l’entraide et la bienveillance.
Pour en savoir plus, écoutez le balado sur la reprise collective !